Le Devoir du 29 mai dernier offrait à
ses lecteurs un texte signé par le professeur Louis Bhaltazar(professeur
de science politique, Université Laval), texte qui mérite d'être lu,
relu et médité tellement il est représentatif
de l'esprit d'une fraction de la « génération lyrique» (avec évocation
de Jacques Couture et Gérald Godin), cette génération qui a présidé à
notre passage de « Canadien-français » à Québécois (L' échec d'une
nation québécoise,
Le Devoir, 29mai). Baignant dans l'esprit de cette génération,
Louis Balthazar écrit : »Au cours des années 1960, les francophones
québécois ont voulu se désigner comme Québécois plutôt que comme
Canadiens français parce qu'ils voulaient, plus
ou moins explicitement, s'en remettre à l'État du Québec pour concevoir
leur avenir. Cela ne pouvait signifier que leur conception de
l'apparence collective et leur vie sociale était liée au territoire
québécois et à tous ceux qui y vivaient . Il fallait donc
apprendre à vivre avec les anglophones et les immigrants ». Après cette
déclaration que pourrait signer à deux mains un Justin Trudeau, Louis
Balthazar se reprend et écrit: »Sans doute fallait-il s'imposer comme
majorité, mais il fallait reconnaître les droits
des minorités. Il fallait surtout apprendre à dialoguer avec des
personnes qui nous paraissaient étrangères à notre société les inclure
dans notre conception du Québec moderne. Cela ne s'est pas produit
instantanément ni facilement. Trop de mauvais souvenirs
d'injustices, d'oppressions et trop de vieux préjugés nous amenaient à
nous penser encore comme Canadiens Français, tout en nous disant
Québécois, voire à faire l'équation entre le Québec et sa majorité
francophone. Mais nous avons fait peu à peu de grands
progrès, nous sommes devenus assez confiants en nous-mêmes pour
reconnaître les citoyens minoritaires comme des citoyens à part entière
et partager avec eux notre vie commune et concevoir avec eux une
nouvelle vie publique commune.
Sous les dehors d'une savant analyse,
Louis Balthazar régurgite tristement tout les lieux communs du
nationalisme civique, il ne lui vient pas à l 'idée que cette nation
québécoise que les nationalistes des années 1960
entendaient constituer ne pouvait naître qu'en rupture avec la nation
canadienne-française et que « faire l'équation entre le Québec et sa
majorité francophone » n'est peut être qu'un juste et souhaitable retour
des choses. Plutôt que de reconnaître la rupture
entre la nation canadienne-française et la nation québécoise une nation
québécoise qui ne pouvait avoir en dépit des efforts et de la bonne
volonté des Chaput, d'Allemagne et Bourgault la substance et la densité
du Canada français avec sa langue, ses institutions,
sa résilience(avec la Survivance), notre histoire commune, sa conquête
et son occupation du territoire, il y a quelque chose de la geste dans
l'histoire de la Nouvelle-France et du Canada français. C'est une
nation artificielle que nous proposait la « génération
lyrique » , on songe à l'URSS constituée sur les ruines de la Russie
impériale. Pourquoi vouloir l'indépendance de cette nation avec des
anglophones descendants de nos conquérants et occupants et des
immigrants, corps étrangers imposés par Ottawa. Appartenir
à une nation c'est plus qu'habiter le même territoire, que deviennent
l'histoire commune, la langue, la religion dans certains cas, la volonté
de vivre en commun, volonté de vivre en commun qui semble bien absente
chez les citoyens minoritaires de Louis Balthazar,
citoyens qui semblent se satisfaire de vivre en parallèle avec Nous sur
le même territoire que Nous, l'appartenance territoriale commune est
bien le plus petit commun dénominateur que puisse partager des nationaux
avec la déclaration de revenus. Balthazar
décidément en verve poursuit en écrivant: « Malgré tout l'idée d'un
Québec divers et multi ethnique faisait des progrès jusqu'au tournant du
siècle.» Après cette apologie des politiques libérales, Louis Balthazar
décoche une flèche à l'Action Démocratique
du Québec et à son nationalisme identitaire, nationalisme identitaire
adopté par le Parti Québécois après sa défaite de 2007: « Cela nous a
valu la charte des valeurs de 2013, et par la suite une conception très
étroite du « Nous» québécois.» Déjà, des intellectuels
se sont mis à définir la nation en d'autres termes. Tout en admettant
que l'État québécois doive être respectueux des minorités, ils
accordaient un rôle particulier à la majorité francophone en raison de
son enracinement historique. En d'autres termes, la
nation ne pouvait être que canadienne-française même si l'État était
pluraliste. La Coalition Avenir Québec représente la forme la plus pure
de ce recul vers l'appartenance canadienne-française. Rarement a-t-on vu
un gouvernement aussi peu représentatif des
minorités. Le présent gouvernement est pratiquement absent de la
métropole et des autres centres urbains du Québec . il s'en remet
exclusivement à la majorité francophone pour faire des lois qui
déplaisent aux minorités. Aucun véritable dialogue avec ces minorités.
on oublie qu'une démocratie libérale ne repose pas sur la loi de la
majorité, mais aussi sur les droits des minorités ». Ce n'est pas au
Devoir que Luis Balthazar devrait écrire, mais il serait plus avisé de
se présenter devant la commission parlementaire
sur le projet de loi 21.
Louis Balthazar est probablement trop
occupé par son enseignement et ses publications pour prendre les quelque
minutes nécessaires à la lecture de « Notes sur René Lévesque et le
traditionalisme canadien-français »,
texte de l'historien Xavier Gélinas, (paru dans Alexandre Stefanescu
(dir.
René Lévesque:Mythes et réalité,Montréal, VLB Éditeur. 2008, 249
p.). XavierGélinas écrit: Robert Comeau et Mathieu Bock-Côté font
presque cavalier seul en écrivant tout récemment qu'[e]ntre le
nationalisme canadien-français et le nationalisme québécois,
on retrouve une continuité conceptuelle et historique indéniable. »
Tout politicologue qu'il soit Louis Balthazar, oublie un peu commodément
que la Coalition Avenir Québec a présenté des candidats dans toute les
circonscriptions du Québec et que ce sont ses
« minorités » qui ont choisi de mettre leurs oeufs dans le même panier
en votant pour le Parti Libéral du Québec. Ce n'est pas avec des
colonisés comme Louis Balthazard que le Québec pouvait espérer faire son
indépendance.
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