Sunday, September 1, 2019

La peur au ventre la rage au coeur


Nous voilà revenus au beaux jours des débats entourant l'adoption du projet de loi 21. Il était certes facile d'imaginer l'exploitation sensationnaliste que ferait un certain lobby religieux de l'application de la loi 21. Nous en avions eu un avant-goût avec des articles sur les pauvres étudiantes voilées que la loi 21 forcerait à renoncer à leur «vocation». La rentrée scolaire à la Commission scolaire de Montréal (CSDM) est l'occasion de revenir sur cette thématique, une rentrée qui se déroule alors que la Commission a décidé qu'elle appliquerait les dispositions de la loi 21 sur le port du voile islamique par ses enseignantes. Les commissaires de la CSDM avait initialement décidé que la Commission n'appliquerait pas la loi 21. C'est lors d'une assemblée des commissaires tenue fin août quels CSDM a finalement décidé d'appliquer la Loi 21 dans ses établissements.  Cette séance a donné l'occasion à l'une de ces enseignantes voilées de tenter de convaincre les commissaires de s'en tenir leur position initiale et de déroger à la loi.  Ayant recours à des arguments relevant plus du sensationnalisme que de la raison (Une rentrée avec la peur au ventre pour cette enseignante, Journal de Montréal, 29 août), Dalida Matoub qui enseignerait au Québec depuis douze ans dit: »n'avoir senti un tel climat de tension à l'approche de la rentrée, comme ce qu'elle a vécu cette semaine[...]Elle se dit attristée par la tournure des évènements qu'elle explique par cette loi qui ouvre la porte: «pour dénigrer l'Autre». Elle a également rapporté qu'un parent d'élève a demandé à l'école que sa fille ne soit pas dans la classe de l'»enseignante voilée»», la demande a été faite par des parents de l'école Marie-Rollet, dans le quartier montréalais de Rosemont. Un parent qui à notre avis a mieux compris l'esprit de la Loi 21 que François Legault et Jean-François Roberge. L'un et l'autre ayant précisé qu'il n'était pas question pour les parents de « magasiner » une enseignante et qu'ils devraient accepter la classe telle que constituée. Cette triste décision est cohérente avec la traditionnelle politique gouvernementale, politique du gouvernement ou de la caste des fonctionnaires du ministère de l'Éducation, jaloux de leurs pouvoirs et fiers de leurs choix pédagogiques, il a ainsi été refusé aux parents le droit de retirer leur enfant des cours ECR, de même que des cours d'éducation à la sexualité. La solution aux problèmes d'application de laLoi 21 réside peut-être justement dans l'acquiescement aux demandes de ces parents (Signes religieux: des parents d'élèves reviennent à la charge, Radio-Canada, 29 août). Si les commissions scolaires acquiesçaient à ces demandes dont rien ne dit quelle seront nombreuses, les enfants seraient retirés des classes et placés dans celle d'une enseignante non-voilée. Les enseignants qui évoquent régulièrement la taille des groupes et le ratio maître-élèves pourraient y trouver leur compte. Sortie de crise peu élégante car elle laisse reposer sur les épaules de parents isolés le poids de l'application de la loi sur la laïcité. Solution un peu hypocrite car, elle permet de maintenir intégralement la Loi 21 tout en fermant les yeux sur des aménagements locaux et circonstanciels. 
 

 
 
L'article du Journal de Montréal ne fait pas mention de menaces visant spécifiquement Mme Matoub ou d'une plainte au SPVM, elle se sent menacée par la loi 21 et la  demande d'un parent. Il est toujours loisible à Mme Matoub d'aller travailler dans une institution de réseau scolaire privé, il lui est également loisible de demander une mutation dans une école plus « diversifiée » de la CSDM, une école du quartier Côte-des Neiges par exemple, un tel geste lui permettrait de conserver son ancienneté et les avantages sociaux qui vont avec cette dérnière (choix de vacances, etc.).  Mme Matoub avait probablement en tête le « spectacle » quelle comptait donner qu'à un examen réfléchi des alternatives.

Que le résultat de ce choix contredise clairement l'esprit de la loi 21 échappe visiblement à F. Legault et J.-F. Roberge, dans les faits, une enseignante portant des signes religieux enseignera , dans ce cas, la situation est aggravée par le fait qu'elle enseignera à une fillette. Comprenne qui pourra. Indigne représentant de son gouvernement et de la population québécoise, le ministre de l'Éducation du Québec, Jean-François Roberge, a probablement dormi tout au long des débats autour de la laïcité.  Plus lucide La militante pro-laïcité, Nadia El-Marbrouk plaide pour le droit des parents à choisir (une militante pour la laïcité demande à Québec de « respecter la volonté des parents», Journal de Montréal, 29 août). Il faudra visiblement s'y faire, il y aura d'autres «enseignantes voilées» venant déchirer leurs chemises devant les média (à défaut de déchirer leur voile). 
À prévoir aussi l'entrée d'une première « policière voilée au sein du SPVM, les média ont déjà préparé le terrain (Déterminée à être policière et à conserver son voile, Journal de Montréal, 12 avril 2018) et nous ne manquerons probablement pas d'entendre parler de Sondos Lamrhari, au cours des mois et des années à venir. Après la ronde des débats et des manifestations autour de l'adoption de la Loi 21, c'est la rage au coeur que nous avons devant la pusillanimité du gouvernement Legault, mais aussi la peur au ventre sur l'avenir du Québec si la digue dressée par la loi 21 devait céder

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