À
première vue, les tensions Occident-Russie autour de l’Ukraine peuvent
apparaître comme un nouvel épisode de la Guerre froide. L’Occident a
choisi de se méfier de Vladimir Poutine , distribué dans le rôle du
méchant caractérisé par sa duplicité et sa fourberie son agressivité sur
fond de mouvements de troupes à la frontière ukrainienne. Les
chancelleries occidentales semblent actuellement convaincues que
l’occupant du Kremlin leur prépare un coup à la Criméeenne. Les
relations entre l’Occident et la Russie sont aujourd’hui marqués du
sceau de la méfiance. Ce sentiment est visiblement aussi celui qui
prédomine à Moscou à notre égard:«C’est que le président russe ,
Vladimir Poutine , est convaincu que la progression constante des
frontières de l’OTAN vers la Russie menace la sécurité, sinon la survie
de son pays. Il y a 30 ans, ces frontières étaient situées à 1200
kilomètres de Saint-Pétersbourg. Aujourd’hui elles sont à 100
kilomètres. Si l’Ukraine tombe dans le camp occidental, l’OTAN pointera
ses armes vers le coeur d la Russie. D’ou la colère du chef du Kremlin
qui ne cesse de rappeler que, dans les années 1990, les leaders
occidentaux avaient donné des assurances orales à Mikhaïl Gorbatchev et
Boris Eltsine sur le non-élargissement de l’OTAN vers l’Est. Ces
assurances, dit-il, ont toujours été violées.»(Comment la Russie a
trompé laRussie, LaPresse, 24 décembre).
« Poutine
a-t-il raison? la réponse est oui. il est important ici d’avoir à
l’esprit la chronologie des évènements et les propos prononcés par les
uns et les autres pour bien comprendre les origines de la crise
actuelle. L’historienne américaine Mary Elise Sarotte nous aide à voir
plus clair. Elle vient de passera des années à éplucher les archives, à
lire les notes manuscrites et les discours des principaux protagonistes,
ainsi que les procès-verbaux de leurs rencontres. Le résultat de ce
méticuleux travail est un fascinant ouvrage paru il y a quelques jours: Not One Inch. America , Russia and the making of Post-Cold War Stalemate.(Yale University Press) […] Tout
commence quelques semaines après la chute du mur de Berlin en novembre
1989. à Washington, Le président Bush père se demande à quoi va
ressembler la sécurité du continent européen. Plusieurs pays du pacte
deVarsovie réclament leur adhésion à l’OTAN. Dans les couloirs du
département d’État, on parle d’admettre la Hongrie, la Pologne et la
Tchécoslovaquie, et Bush lorgne même vers les pays baltes[…] En
Allemagne, le chancelier Helmut Kohl n’a qu’une obsession en tête:
par.unification des deux Allemagnes. Les Occidentaux doivent offrir
quelque chose Moscou s’ils veulent obtenir le départ des troupes
soviétiques le maintien d’une Allemagne réunifiée au sein de l’OTAN. Le
ministre allemand des Affaires étrangères, Hans-Dietrich Genscher, ouvre
le balades un discours prononcé en janvier. «Je veux que l’OTAN,
Dit-il, affirme sans équivoque que peu importe ce qu’il adviendra au
sein du pacte de Varsovie, il n’y aura pas d’expansion du territoire de
l’OTAN vers l’Est, c’est à dire plus près des frontières de l’union
soviétique». Lors de deux événements séparés, Allemands et Américains
font une promesse verbale. Genscher s’engage: quoique qu’il arrive du
pacte de Varsovie, dit-il, « une expansion du territoire de l’OTAN vers
l’Est, soit plus près des frontières de l’Union soviétiques, n’aura pas
lieu». Au même moment, à Moscou, le secrétaire d’État
américain James Baker rencontre le leader soviétique Mikhaïl Gorbatchev.
Au cours de la conversation, il lui propose un marché sous forme de
question: « Préférez-vous qu’une Allemagne réunifiée soit liée à l’OTAN,
avec l’assurance que le territoire l’OTAN ne sera jamais déplacé,
neserait-ce que d’un piucevers l’Est par rapport à sa position
actuelle? » À quoi Gorbatchev répond: « Toute expansion dela zone de
l’OTAN n’est pas acceptable. »Baker acquiesce: » Nous sommes d’accord
là-dessus.»Rien de ceci n’est écrit, mais de ces déclarations , il faut
tirer l’esprit. Va pour l’esprit, mais les Gorbatchev et Baker auraient
dû se souvenir que les paroles s’envolent et que les écrits restent.
« Pas
pouce» vers l’Est a dit Baker. Et pourtant , l’OTAN s’est élargie en
1999 puis en 2004. Pourquoi?Mary Elise Sarotte avance plusieurs
explications dont une résume toute la situation: les Occidentaux ont
profité de la faiblesse de la Russie sous Gorbatchev et Eltsine.
L’histoire
de l’élargissement de l’OTAN démontre comment lejeudesgrandes
puissancesest une arène ou seulela défense des intérêts compte. Les
Occidentaux n’onttenu aucun compte des intérêts de la sécurité de la
Russie. L’Ouest avait gagné la guerre froide, la Russie devait se
soumettre. Poutine a retenu la leçon. Depuis son accession au pouvoir il
y a 20ans, il renforce son pays, redresse son armée, établi ses lignes
rouges. ilets maintenant prêt pour la bataille. Dans ses échanges avec
le président Biden et les États-Unis Vladimir Poutine peut se remémorer à
chaque jour le dicton volant que: si tu me trompes une fois honte à
toi, si tu me trompes deux fois, honte à moi. Il serait surprenant
qu’avec un Vladimir Poutine sur ses gardes, il y ait une deuxième fois.
Plutôt que de se laisser absorber par la «crise» ukrainienne, n’y
aurait-il pas lieu de se consacrer à compter d’aujourd’hui à la
constitution d’un bloc eurasiatique en mesure de faire dace à la montée
en puissance de la Chine et d’entrer finalement dans le XXIe siècle.
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