Sunday, December 8, 2019

Mike Ward et humour



L'affaire Mark Ward\ Jérémy Gabriel est devant les tribunaux depuis quelques années et elle y restera encore quelques années. Le Tribunal des droits de la personne  a d'abord condamné Mike Ward à verser 35 000$ à Jérémy Gabriel et 7000$ à sa mère  décision portée en appel, décision maintenue par la Cour d'appel pource qui est de la somme à verser à Jérémy Gabriel.  Il y a quelques jours, la Cour d'appel a jugé que les blagues de l'humoriste avaient un caractère discriminatoire. Décidément pugnaces, l'humoriste et son avocat, Me Julius Grey, sont désormais disposés à se rendre en Cour suprême pour défendre la liberté d'expression. Chacun pourra juger si cette affaire mérite d'être tenue comme emblématique de la liberté d'expression, curieuse liberté d'expression que celle qui autoriserait des blagues discutables contre un jeune handicapé, à ceux-là, il est possible répondre que la liberté d'expression est indivisible et qu'elle ne doit pas être tributaire des domaines d'exercice, certains plus nobles que d'autres, la liberté d'expression en matière de recherche historique par exemple.

L'affaire Ward\Gabriel soulève des questions relatives à la liberté d'expression, mais aussi à l'humour, est-il possible de rire de tout?

La chroniqueuse du Devoir, Odile Tremblay, apporte une curieuse réponse à cette question. «L'humour est en constante évolution, quoi qu'en en dise. Les caricatures sur les juifs cupides aux nez crochus qui foisonnaient dans les journaux européens jusqu'à la fin de la dernière guerre mondiale n'ont plus cours. Les blagues sur les bamboulas et les bougnoles devant lesquelles se tordaient les publics des anciennes colonies et des contrées au passé esclavagiste, ne sont pas tolérées comme jadis. [...]Les gays sont moins raillés qu'autrefois après avoir fait valoir leurs droits sur la place publique» (Par delà l'affaire Jérémy Gabriel, 5 décembre). Personne à la rédaction du Devoir n'a jugé bon de faire remarquer à Odile Tremblay que les termes «bamboulas» «bougnoles» sont éminemment insultants et blessants pour les gens d'origine africaine pour les premiers et d'origine maghrébine pour les seconds et que le temps d'une chronique elle se transforme élue-même en Mike Ward. pour faire bonne mesure, il ne manque à cette brève énumération que la mention de «ratons», si Me Tremblay devait s'engager dans cette voie, prévenons le contentieux du Devoir qu'il pourrait à son tour se retrouver devant le tribunal des droits de la personne. Pour les « bamboulas », la situation est moins claire et il semblerait que l'humour demeure possible si vous êtes le fils d'un ancien premier ministre et vous-même premier ministre. Pour ce qui est des gays, difficile de ne pas penser cependant que dans le cas des gays nous ne sommes pas en face d'un repli du «type silo», seul les humoristes gays semblant avoir conservé le droit de rire des gays, une analyse même sommaire des prestations d'un Alexandre Perron permettrait probablement de vérifier cette intuition. Combien temps sera-t-il encore possible de faire des blagues sur les femmes, les Noirs, les Arabes, les Musulmans, les homosexuels? Au rythme ou vont les choses, le dernier objet de moquerie possible sera le responsable de tous les malheurs de ce monde;  l'homme blanc hétérosexuel.
Pour illustrer sa conviction que l'humour est en «évolution constante», Madame Tremblay ayant gratté les fonds de tiroir de sa culture historique ne trouve rien de plus convaincant que de jouer avec le point Goodwin, Assimiler Mike Ward à Julius Streicher et un peu fort de café. Encore que voir Me Julius Grey défendre Mike Streicher ne manque pas d'ironie. Sans s'égarer dans dans les méandres des « heures sombres de l'Europe» et dans ceux du colonialisme, Mme Tremblay en demeurant au Québec aurait trouvé amplement de munitions pour alimenter sa réflexion illustrer son propos sur.
 Une allusion aux Cyniques des années 1960 avec leur humour anti clérical étroitement associé au climat de la Révolution tranquille aurait suffi à faire comprendre ce phénomène de « l'humour en constante évolution ».  Encore qu'à bien y penser, il soit assez facile de retrouver dans l'humour québécois actuel, des blagues anti catholiques. L'humour évolue peut-être, mais il n'évite pas toujours la facilité.

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