La démission surprise de Catherine
Fournier (députée péquiste de Marie-Victorin) a suscité de nombreuses
réactions allant de la surprise à la désapprobation. La réaction de la
chroniqueuse Francine Pelletier du Devoir,(
La lente agonie, Le Devoir, 13 mars) va plus loin. Elle se penche
sur ce qui a son avis , est en train de «tuer le PQ». Profitant de
l'occasion pour prendre ses distances avec le PQ, elle écrit: »En
attendant, pour avoir cru, moi aussi, en René
Lévesque , et applaudi à sa capacité de nous relever collectivement le
menton, voici ma propre liste de ce qui est en train « de tuer le PQ ».
« L'histoire (avec un H). né dans la foulée de la Révolution tranquille
et béni par la présence de grands esprits(Lévesque,
Bourgault, Parizeau...) le parti avait à ses débuts quelque chose de
proprement révolutionnaire dans sa vision émancipatrice du
Québec.Cinquante ans plus tard, rongé de l'intérieur par son obsession
du « bon gouvernement », dénué d'un idéal qui lui soit propre
, contemplant un Québec qui n'a vraiment plus rien à voir avec celui
des années des années 1960, le PQ souffre affreusement de la comparaison
entre hier et aujourd'hui. Le contraste entre ce qu'il représentait à
l'époque et ce qu'il représente aujourd'hui
est, comme les photos de votre tendre jeunesse, insupportable.
Francine Pelletier ne s'adresse pas aux jeunes qui seraient sensés faire
aujourd'hui (c'est nous qui soulignons), mais à sa génération de
baby-boomers. Il y a des phases dans la vie d'un parti politique
et le PQ comme elle le note est sorti de sa jeunesse en affirmant un
jour être en mesure de prendre en mains les rênes du gouvernement,
maturité oblige. La question qui se pose
est, est-ce que Francine Pelletier est sortie de la sienne, quelqu'un
veut-il la prévenir que le pot est légal et que si elle n'a a brulé ses
soutien-gorges, le temps est passé. Le
peace and love est derrière nous depuis belle lurette. Les
boys sont revenus du Vietnam, le retour à 2019 de Madame Pelletier
s'accompagne d'un peu de lyrisme, elle écrit :»On a beaucoup dit que
René Lévesque nous avait donné l'indépendance sans pourtant la réaliser.
C'est vrai , mais c'est aussi ce qui tue, en
partie, le PQ, aujourd'hui. il a participé à sa propre obsolescence
tout en étant incapable de conquérir de nouvelles frontières ». Le héros
prométhéen n'a pas réussi à entrainer son peuple au delà de cette
frontière, n'est pas Moïse qui veut.
Le plat principal de la chronique de
Madame Pelletier ne réside pas dans cette critique du «bon
gouvernement », mais dans une critique de la tentation identitaire à
laquelle le PQ aurait succombé le 30 octobre 1995: »la
défaite de 1995 a été bien plus dévastatrice encore Le poison dont
parle Jean-François Lisée a très peu voir avec le penchant des médias
pour les mauvaises nouvelles. Ce qui empoisonne le PQ aujourd'hui
remonte aux paroles prononcées par Jacques parizeau
le 30 octobre. Sa malheureuse allusion aux «votes ethniques » a non
seulement planté la graine de la division, elle a sonné le début d'un
nationalisme frileux et du débat identitaire. La charte des valeurs
proposée par le gouvernement Marois, des années plus
tard. n'est rien d'autre que la pousse issue de cette même semence, une
tentative là encore combien maladroite , de planter son drapeau en
reprochant aux Autres de ne pas être suffisamment comme « nous autres ».
À notre avis l'adoption de la Charte des valeurs
aurait peut-être permis la réélection du gouvernement Marois en et
rendu impossible l'élection du gouvernement Legault en 2018, Le PQ
évoquant lui aussi un réduction significative du nombres d'émigrants. La
CAQ aurait été incapable de constituer le fonds de
commerce (signes religieux ostentatoires, égalité homme-femme,
accommodements raisonnables) qui lui a permis de remporter l'élection du
1er octobre.
Nous sommes tentés de dire poliment à
Madame Pelletier qu'elle a tout faux. Elle peut juger « malheureuse»
l'allusion de Jacques Parizeau au soir du 30 octobre 1995, mais elle ne
peut la présenter comme mensongère,
le «grand esprit» de années 1960, devient au terme de cette allusion,
un pelé et un galeux de la cause souverainiste, pour un peu son « argent
et ses votes ethniques » expliquerait Viktor Orban, Matteo Salvini,
Marine Le pen et tous ces politiciens populistes
européens soucieux de voir leurs pays conserver leur traditions et
leurs modes de vie et voir les nouveaux arrivants se comporter comme
« nous autres» en vertu du principe voulant « qu'à Rome... ». ce n'est
pas la seule pierre qu'elle lance à Jacques Parizeau:
«Cet étonnant repli sur soi -tout le contraire de ce qu'était Jacques
Parizeau ou de ce qu'annoncait le PQ au départ - a fait fuir d'abord les
communautés culturelles (qui a vu les fameuses « communautés
culturelles se ranger derrière les couleurs de la souveraine
du Québec, elles ne le feront probablement jamais trop à l'aise
qu'elles sont dans les rangs des troupes multiculturalistes) , ensuite
les jeunes, et finalement, la charte faisant déborder le vase, les
progressistes de tout acabit. Ce que l'on devine en en
creux sans trop de problèmes dans les propos de Francine Pelletier
c'est un appel à se ranger derrière Québec Solidaire et à solder le
Parti Québécois.
Francine Pelletier conclut en écrivant:
« À force de détourner le regard, le ver s'est non seulement infiltré
dans la pomme, il a fini par en manger les trois quarts.» Il faut
comprendre que le ver est le nationalisme
identitaire et qu'il ne reste qu'un quatre de PQ, ce quart sera-t-il
suffisant pour rebâtir le vaisseau-amiral du souverainiste avant que QS
ne reprenne le flambeau, à moins qu'il ne faille espérer la construction
d'un véritable mouvement identitaire en dehors
du PQ et une radicalisation de la CAQ.
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