Sunday, January 5, 2020

Bye Bye BYE BYE


L'exercice revient à chaque début d'année, apparemment inutile d'une année à l'autre, puisque les choses changent peu. Les critiques du BYE BYE constituent un matériel dont les média écrits ne semblent pas être en mesure de se priver alors que l'actualité fonctionne au ralenti (congé parlementaire, accalmie sur le front des activités culturelles, etc.).  



Cette année, les média se sont particulièrement intéressés à la cuvée 2019 du BYE BYE. Curiosité d'autant plus surprenante que nous n'avons pas eu droit à une cuvée exceptionnelle. À défaut de sortir du lot, le BYE BYE 2019 était cependant révélateur de l'état de la société québécoise. Force nous est bien de constater l'importance de la télévision dans notre imaginaire, ou pour être plus précis, de la publicité télévisuelle:«[...] Tous les Québécois et toutes les Québécoises sont unis par au moins une chose. Laquelle ? Tous les Québécois et toutes les Québécoises sont unis par le dégout que leur inspire la tabarouette de publicité sur la mycose des ongles qui, a ce stade-ci, a probablement fait plus de ravages que la mycose des ongles elle-même.» (Bye Bye 2019: tous unis par la mycose des ongles , Le Devoir, 1er janvier).  Autre sketch ayant suscité un intérêt disproportionné celui de la chaîne A&W («On se demande bien, en tous cas, ce que le pauvre Michel Olivier Girard, l'acteur figurant dans les publicités de la chaîne de restauration rapide A & W a fait pour qu'on l'humilie à ce point (Le Devoir, idem. Et aussi, Sympathie pour le gars des burgers, La Presse, 3 janvier. S'érigeant en vigilant gardien de la rectitude politique, Le Devoir n'oublie pas de nous rappeller qu'il  est de mauvais ton de blaguer sur la «diversité», «Et il est temps que l'on cesse de penser que d'ajouter des lettres à l'acronyme LBGTQ-LGBTQR2D2, vraiment? génère miraculeusement ce qu'il convient d'appeler une blague.» Nous voilà prévenus sur les nouvelles vaches sacrées. Mention spéciale au trop bref sketch sur Madame Coucou de Passe-Partout et son homosexualité et la leçon qu'elle donne à Prunelle et  Pruneau sur L'hétérosexualité normative. Mention spéciale, aussi encore là au sketch trop bref, sur la visite de Greta Thunberg à Montréal et la Marche sur le climat, belle occasion de rire de Dominic Champagne et du Pacte de transition, présentant Dominic Champagne en véritable m'as-tu vu de la lutte aux changements climatiques), Amusant, mais encore un peu léger, le sketch sur la vedette américaine Céline Dion, une Céline Dion de plus déjantée. Au visionnement du BYE BYE 2019, force était de comprendre que l'actualité socio-politique, pourtant année d'élections fédérales et de réforme du droit de l'immigration et d'adoption de la Loi 21, rassemblait moins que les publicités sur la Mycose des ongles. Pauvre Québec. Devant cet état de choses, faut-il en conclure, qu'il n'y a plus vraiment de société québécoise, mais autant de sociétés québécoises qu'il y a d'écrans de télévision au Québec. Devrons-nous nous résoudre à dire adieu à tout projet collectif?

La formule des revues de fin d'année a-t-elle fait son temps, l'abondance des humoristes fait-elle qu'il est de plus en plus difficile de présenter une revue d'ensemble de l'année écoulée. Une réponse nous est-elle partiellement fournie par le sketch sur le black face de Justin Trudeau et la difficile réunion de production précédant sa production avec débat sur les questions de censure, de racisme,  et d'appropriation culturelle? Allons-nous vers des revues de fin d'année aseptisées?

Le BYE BYE a atteint l'âge vénérable de cinquante ans (sa diffusion ayant débuté en 1968), le temps est peut-être venu de passer à autre chose. Attendant peut-être son heure dans la coulisse, la formule malgré les difficultés annuelles du BYE BYE n'est pas sur le point de disparaître avec les Infoman de Jean-René Dufort, un Jean-René Dufort qui fait dans l'irrévérence facile de potache depuis des années avec ses cravates laides et sa garde-robe de vestons sciemment mal ajustés et de bas censément drôles, il faudrait probablement songer à   une date de péremption pour Dufort, il y a longtemps qu'il n'est plus drôle et qu'il fait montre d'une remarquable complaisance à l'endroit des hommes politiques en place: »On est tu ben juste en coton ouaté? Jean-René Dufort pourra désormais répondre mieux que quiconque à cette insignifiante question, le super-héros de l'information ayant mis à l'épreuve les limites du décorum prévalant à l'Assemblée nationale, en se présentant devant son président François Paradis vêtu d'un complet entièrement taillé en gros coton mou. Un François Paradis se prêtant complaisamment à l'exercice en s'affublant lui-même d'un coton ouaté gris. [Toujours sur Justin Trudeau] Par delà leur ton bon enfant, ces échanges auront encore une fois été révélateurs. Que Justin Trudeau ait exigé que l'animateur se présente devant lui avec une vraie cravate (pas une laide) en dit long sur la frayeur que provoquent maintenant les costumes au 24, Sussex. La preuve que l'obéissance, pour le fou du roi astucieux, est parfois moins un compromis , qu'une stratégie.» (Le Devoir, idem Nous ne croyons pas à cette frayeur, mais nous croyons volontiers à l'obséquité de Jean-René Dufort. Jean-René Dufort n'est pas un « fou de roi astucieux », mais un courtisan habile. Si le journaliste considère cela comme de la stratégie, nous lui signalons qu'il y a plusieurs stratèges à l'intersection montréalaise des rues Sainte-Catherine et Saint-Laurent. L'équipe de À la semaine prochaine, émission sur les ondes de Ici Radio Canada Première chaîne, nous offrait Un spécial intitulé pour l'occasion À l'année prochaine, un prétendant que son humour radio-canadien et nettement platoïde pourrait disqualifier.  Si les auteurs des revues télévisuelles de fin d'année doivent peser chaque mot et chaque séquence afin de n'offenser personne et se contenter de brocarder les publicités les plus diffusées au petit écran.  
Il faudra conclure que le temps de dire  Bye Bye BYE BYE est peut-être venu.

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