Est-ce que c’est parce que l’on donne le Parti québécois (PQ) comme mourant que l’on se précipite ainsi à son chevet?
Premier
à se rendre ainsi au chevet du PQ, Son ancien chef, Lucien Bouchard qui
, le 3 juin dernier, dans une longue entrevue avec le journaliste
Patrice Roy sur les ondes de Radio-Canada, déclare en parlant justement
du PQ:« Si le véhicule est usé, et que les gens n’en veulent plus, on en
choisira un autre.» Évoquant René Lévesque, il dit qu’il faut faire la
distinction entre l’idéal et le véhicule.
Les
propos de Lucien Bouchard ne demeureront pas sans échos. Présence plus
surprenante, nous verrons au chevet du PQ, la soeur de René Lévesque,
Madame Alice Lévesque. « La soeur de René Lévesque est en colère contre
l’ex-premier ministre Lucien Bouchard. Celui qui est président d’honneur
de l’«Année Lévesque» a condamné «le Parti québécois au trépas»
dit-elle, au lieu de faire honneur à son frère. Pendant que vous
décrivez le Parti Québécois comme un «véhicule usé», qui ne «mérite pas
de très bien aller», dites que «c’est pas fort», que «ça ne clique
pas », que «les gens n’en veulent plus» et qu’«on en choisira un autre»,
on vous entend en revanche vous attrister du sort réservé aujourd’hui
au Parti libéral», a t-elle décrit.»(Lucien Bouchard critiqué par la
soeur de René Lévesque , Journal de Montréal, 6 juin).
«Lucien Bouchard admet avoir eu des mots durs récemment dans un
entretien à Radio-Canada et lors du dévoilement de la statue de Jacques
Parizeau à l’Assemblée nationale. Il souhaitait nuancer ses paroles. Il
assure que personne ne peut contester le rôle fondamental qu’a joué ce
parti dans notre histoire récente.[…]Puis il mentionne qu’il a également
eu de bons mots. «J’ai réitéré que l’indépendance est une «nécessité
politique», que « le rêve est toujours là». J’ai dit clairement que je
n’escompte pas la disparition du PQ» écrit-il , ajoutant qu’il ne lui
appartient pas, «pas plus qu’à quiconque»de décréter la mort d’un parti ,
ni sa survie. «Mais aux électeurs», dit-il. «Nous aurons une petite
partie de la réponse en octobre , mais encore là, elle ne saurait être
définitive.» (Lucien Bouchard répond à la soeur de René Lévesque , Journal de Montréal.
7 juin). Les lecteurs de ce blogue pourront comme moi se demander quel
est l’intérêt de connaître l’opinion de la soeur de René Lévesque? La
loyauté filiale ne saurait tenir compte d’analyse politique. La question
du «véhicule usé» soulevée par Lucien Bouchard mérite mieux que les
considérations de Mme Alice Lévesque. Certes, au vu de la performance du
PQ au dernier scrutin général et à la lecture des sondages récents, il
est tentant de conclure que le «véhicule est usé » et que les «gens
n’en veulent plus». Faut-il conclure pour autant que nous devons envoyer
le PQ à la casse.
À
notre avis, LucienBouchard va un peu vite en affaire lorsqu’il affirme
qu’«on en choisira un autre». Les partis politiques ne sortent pas des
chapeaux de magiciens. La création du PQ avait été rendue possible par
toute l’effervescence politique des années 1960 et l’existence de
l’homme de la nationalisation de l’électricité, celle du Bloc Québécois
fut elle aussi rendue possible par l’agitation suivant l’échec du Lac
Meech et la personnalité de Lucien Bouchard. En attendant d’en «choisir
un autre» et afin de ne pas se contenter du «nationalisme dans le
Canada» de François Legault et de Bernard Drainville, ne portons pas en
terre trop rapidement le PQ. Comme le constate Lucien Bouchard:
L’indépendance demeure une «nécessité politique» et «le rêve est
toujours là». Lucien Bouchard eut été mieux avisé de réfléchir aux
conditions pouvant conduire à l’émergence d’un nouveau «véhicule» à
moins que comme Bernard Drainville et François Legault, il ne faille le
considérer lui aussi comme un «nationaliste à l’intérieur du Canada»,
passé de l’indépendance à l’autonomisme. Lucien Bouchard a toujours été
étranger à l’ADN du PQ. Il en est devenu chef un peu par hasard. Plombé
par les résultats des sondages et la domination de la Coalition Avenir
Québec, les beaux jours du PQ peuvent sembler derrière lui, il reste
seul le PQ porte encore le vieux rêve d‘un État français matérialisant
les aspirations de générations de Canadiens-Français. Pour cette seule
raison, le PQ mérite de passer le cap du 3 octobre prochain et de ne pas
être poussé dans les oubliettes de l’histoire. Le véhicule usé comme le
r^ve qu’il porte méritent mieux que les condamnations de Lucien
Bouchard.
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