Friday, June 10, 2022

Le véhicule usé

 


Est-ce que c’est parce que l’on donne le Parti québécois (PQ) comme mourant que l’on se précipite ainsi à son chevet?
Premier à se rendre ainsi au chevet du PQ, Son ancien chef, Lucien Bouchard qui , le 3 juin dernier, dans une longue entrevue avec le journaliste Patrice Roy sur les ondes de Radio-Canada, déclare en parlant justement du PQ:« Si le véhicule est usé, et que les gens n’en veulent plus, on en choisira un autre.» Évoquant René Lévesque, il dit qu’il faut faire la distinction entre l’idéal et le véhicule. 
 

 
 
 
Les propos de Lucien Bouchard ne demeureront pas sans échos. Présence plus surprenante, nous verrons au chevet du PQ, la soeur de René Lévesque, Madame Alice Lévesque. « La soeur de René Lévesque est en colère contre l’ex-premier ministre Lucien Bouchard. Celui qui est président d’honneur de l’«Année Lévesque» a condamné «le Parti québécois au trépas» dit-elle, au lieu de faire honneur à son frère. Pendant que vous décrivez le Parti Québécois comme un «véhicule usé», qui ne «mérite pas de très bien aller», dites que «c’est pas fort», que «ça ne clique pas », que «les gens n’en veulent plus» et qu’«on en choisira un autre», on vous entend en revanche vous attrister du sort réservé aujourd’hui au Parti libéral», a t-elle décrit.»(Lucien Bouchard critiqué par la soeur de René Lévesque , Journal de Montréal, 6 juin). «Lucien Bouchard admet avoir eu des mots durs récemment dans un entretien à Radio-Canada et lors du dévoilement de la statue de Jacques Parizeau à l’Assemblée nationale. Il souhaitait nuancer ses paroles. Il assure que personne ne peut contester le rôle fondamental qu’a joué ce parti dans notre histoire récente.[…]Puis il mentionne qu’il a également eu de bons mots. «J’ai réitéré que l’indépendance est  une «nécessité politique»,  que « le rêve est toujours là». J’ai dit clairement que je n’escompte pas la disparition du PQ» écrit-il , ajoutant qu’il ne lui appartient pas, «pas plus qu’à quiconque»de décréter la mort d’un parti , ni sa survie. «Mais aux électeurs», dit-il. «Nous aurons une petite partie de la réponse en octobre , mais encore là, elle ne saurait être définitive.» (Lucien Bouchard répond à la soeur de René Lévesque , Journal de Montréal. 7 juin). Les lecteurs de ce blogue pourront comme moi se demander quel est l’intérêt de connaître l’opinion de la soeur de René Lévesque? La loyauté filiale ne saurait tenir compte d’analyse politique. La question du «véhicule usé» soulevée   par Lucien Bouchard mérite mieux que les considérations de Mme Alice Lévesque. Certes, au vu de la performance du PQ au dernier scrutin général et à la lecture des sondages récents, il est tentant de  conclure que le «véhicule est usé » et que les «gens n’en veulent plus». Faut-il conclure pour autant que nous devons envoyer le PQ à la casse.
 

 
 
À notre avis, LucienBouchard va un peu vite en affaire lorsqu’il affirme qu’«on en choisira un autre». Les partis politiques ne sortent pas des chapeaux de magiciens. La création du PQ avait été rendue possible par toute l’effervescence politique des années 1960 et l’existence de l’homme de la nationalisation de l’électricité, celle du Bloc Québécois fut elle aussi rendue possible par l’agitation suivant l’échec du Lac Meech et la personnalité de Lucien Bouchard. En attendant d’en «choisir un autre» et afin de ne pas se contenter du «nationalisme dans le Canada» de François Legault et de Bernard Drainville, ne portons pas en terre trop rapidement le PQ. Comme le constate Lucien Bouchard: L’indépendance demeure une «nécessité politique» et «le rêve est toujours là». Lucien Bouchard eut été mieux avisé de réfléchir aux conditions pouvant conduire à l’émergence d’un nouveau «véhicule» à moins que comme Bernard Drainville et François Legault, il ne faille le considérer  lui aussi comme un «nationaliste à l’intérieur du Canada», passé de l’indépendance à l’autonomisme. Lucien Bouchard a toujours été étranger à l’ADN du PQ. Il en est devenu chef un peu par hasard.  Plombé par les résultats des sondages et la domination de la Coalition Avenir Québec, les beaux jours du PQ peuvent sembler derrière lui, il reste seul le PQ porte encore le vieux rêve d‘un État français matérialisant les aspirations de générations de Canadiens-Français. Pour cette seule raison, le PQ mérite de passer le cap du 3 octobre prochain et de ne pas être poussé dans les oubliettes de l’histoire. Le véhicule usé comme le r^ve qu’il porte méritent mieux que les condamnations de Lucien Bouchard.

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