L’état
du français au Québec a suscité de nombreuses réactions au cours des
dernières années, notamment depuis l’arrivée au pouvoir de François
Legault et de la Coalition avenir Québec (pensons simplement à
l’application de la Loi 101 aux Cégeps anglophones.
Ce
qui est notable dans ces réactions, c’est que la question est d’abord
et avant tout posée en terme quantitatifs, et rarement en termes
qualitatifs. Certes il faut se préoccuper de la quantité de français
utilisé au Québec, mais de quel français parle-t-on?
La
qualité du français utilisé au Québec ne nous apparaît pas moins
importante. À ce chapitre, les dernières données tirées des fameux
«examens du ministère» sont attristantes. «Près d’un candidat sur deux a
échoué en orthographe à l’épreuve du ministère de juin dernier. Des
résultants inquiétants, estiment les experts, qui constatent les
difficultés en français chez les finissants depuis le milieu des années
1980.» (Évaluation de l’orthographe secondaire 5 :des résultats
désolants, Radio-Canada, 21 octobre). La langue
française écrite est un terrain miné et il importe de tenir compte des
niveaux de langage. La faiblesse des finissants du secondaire 5 en
orthographe ne doit pas conduire à conclure que les lacunes en orthographe conduisent nécessairement ces mêmes finissants à utiliser un français relâché.
Plusieurs
se sont interrogés sur les raisons de cette désaffectation à l‘égard du
français écrit? Conscients que la maîtrise du français écrit conduit à
une amélioration du français parlé (ne serait ce qu’au niveau de la
richesse du vocabulaire de la construction des phrases). Certains
spécialistes ont déploré la fin des dictées en classe, d’autres ont
proposé que l’on augmente la lecture chez les écoliers
et étudiants québécois. Avant de se tourner vers des solutions, ne
faudrait-il pas s’interroger sur la source du problème? J’ai là-dessus
ma théorie qui vaut bien ce qu’elle vaut.
Le Québec des années 1960, n’a-t-il pas placé toutes ses billes sur le français parlé? Dans la foulée Des insolences du frère Untel et sa dénonciation du joual, Les élites canadiennes-françaises de l’époque n’ont-elles pas voulu corriger le
tir et rapprocher la langue québécoise d’un français normatif (un
français, pour emprunter une expression propre au monde anglo-saxon, un
français Middle Atlantic, une langue aussi à l‘aise à Québec qu’à Paris. Je suis de cette génération qui a connu les exposés oraux tirés du chapeau afin de développer notre aisance avec la langue de Molière, son vocabulaire et ses subtilités.
Ce
parti-pris en faveur de l’expression orale nous a-t-il débarrassé du
joual? Pas sûr! Si le frère Untel revenait aujourd’hui parmi nous, il
s’insurgerait probablement contre le français pratiqué sur les ondes
radiophoniques et télévisuelles et nous gratifieraient probablement
d’une suite à ses Insolences.
La
réponse aux lacunes en orthographe des finissants québécois, des
lacunes qui sont il faut le dire, «triste à pleurer» tient peut-être
dans un rééquilibrage entre enseignement du français écrit et parlé.Le
débat récent sur le retour des «classiques» dans les classes et salles
de cours québécoises pourrait peut-être élargi afin de tenir ce débat.
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